La
" Ligne Rouge ", est une oeuvre d'un lyrisme surprenant...
Ponctué d'une ambition intellectuelle et philosophique fascinante.
Basé sur un roman de James Jones précédemment filmé en 1964,
ce film retrace la bataille de Guadalcanal dans le Pacifique
Sud durant la Seconde Guerre Mondiale.
Récompensé
par l'Ours d'Or du Festival de Berlin en 1999 et nominé 7 fois
aux Oscars (dont celle du meilleur Film et Réalisateur), la
" Ligne Rouge " suit un bataillon, la compagnie Charlie,
préparant l'invasion d'une position forte de l'ennemi japonais.
Au départ, ils ne rencontrent aucune résistance (l'ennemi étant
la plupart du temps invisible). Les Japonais les obligeant à
s'enfoncer dans l'île : une jungle interminable. Un piège où
les soldats américains vont se retrouver confronter à des aborigènes,
des obstacles imprévus, à leurs propres peurs... À la mort,
et surtout au doute.

Mais
attention ! Autant vous le dire tout de suite, ne vous attendez
pas à voir un " Soldat Ryan'bis " , car la démarche
de Malick (le réalisateur) est radicalement différente de celle
de Spielberg qui nous a montré : comment nous faisons la guerre.
Alors qu'à mon humble avis, Terrence Malick, veut essayer de
savoir, comprendre, pourquoi nous faisons la guerre. Il s'attache
bien plus au caractère des différents personnages, qu'aux horreurs
de la guerre, mettant l'emphase sur cette vicieuse compagne
du soldat, qu'est l'attente.
Attente,
d'un tournant... De cet instant terrifiant, pour ne pas dire
halluciné, où l'instinct primitif s'évade de son sommeil. Se
réveille, chez ces soldats qui mitraillent, ravagent, incendient,
et ôtent la vie jusqu'à l'écoeurement. Cependant, au requiem
des armes automatiques et des obus de mortiers, se greffe une
autre " polyphonie ". Celle, de ces voix-off : ces
causeries du fond le l'âme, qui repousse cette guerre, et surtout
cette lassitude face à la mort : cette accoutumance...
Malick,
nous amène au plus profond de la conscience humaine. On s'insinue,
s'achemine, ainsi, des pensées du soldat Witt à celle du colonel
Tall : le génialisime Nick Nolte, vedette d'un casting impressionnant
(voir, ci-dessus).
Cependant,
ce qui interpellent le plus au premier abord, ce sont les images.
Elles sont splendides... Tellement colorées, qu'on s'imagine
regarder " National Geographie ", ou tout du moins
un reportage sur la faune et la flore. Ce sont de véritable
décharges rêveuses et hallucinatoires, la nature est enjouée
et gracieuse, les oiseaux sont rouges, jaunes, bleus, l'herbe
est épaisse et verte, le ciel agresse l'oeil, tellement il éblouit.
Mais cela n'est pas étonnant vu que Terrence Malick est paraît-il,
l'un des derniers coloristes du cinéma international. Remarque,
il faut dire aussi, que le film a été tourné en lumière entièrement
naturelle, et le moins que l'on puisse dire c'est que c'est
somptueux.
Ainsi,
à l'instar d'une B.O. " féerique ", composée par Hans
Zimmer (Gladiator, True Romance...), tout le film est grandiose.
Il est empreint de génie, chaque images à sa place, les descriptions
sont stupéfiantes de vie : la mort, le danger, l'ennui, la lâcheté,
le courage, la victoire, l'échec, la haine, l'amour, l'amitié,
la solitude, le souci, l'espoir, la paix, la violence, le souvenir...
Du reste, on est bluffé par la réflexion qu'arrive à dégager
Malick (il faut dire, qu'il est également un ancien professeur
de philosophie, ça étonne moins), car ici je pense que la guerre
n'est qu'un support à une réflexion sur l'Existence de l'Homme.

En
effet, qu'est ce que la " Ligne Rouge " ? Chacun peut
l'interpréter comme bon lui semble... En cela, moi, je l'a considère
non pas comme une frontière universelle, mais comme une frontière
intérieure à chacun des personnages, à chacun de nous. Il s'agit
de la frontière entre la pulsion de vie et la pulsion de mort.
Et c'est cette frontière que vous allez retrouver durant tout
le film et qui sera en quelque sorte la trame de ce film, pour
ne pas dire la " ligne rouge ".
Alors,
bien sûr, les mêmes personnes qui ont, peut-être trouvé, la
" Ligne Rouge " chiant(e) (ce qui est synonyme pour
moi de grande connerie), diront que c'est fatalement de la philosophie
à 20 centimes... D'Euros, bien entendu. Mais, c'est assurément,
et ce.., en écoutant bien : la vérité !
Car,
ce film, est une expérience unique, déconcertante même. Loin
d'être paisible, la " Ligne Rouge " réussit le pari
de nous troubler, émotionnellement et intellectuellement (bien
plus que le " Soldat Ryan "). De ce fait, si après
avoir vu le film, vous avez l'impression presque apaisante,
de ne pas avoir " dégueuler " votre Double-Cheese
ou Big-Mac, dîtes-vous bien, qu'à bon escient ou non, il y a
peut-être quelque chose qui vous a échappé...

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EPILOGUE -
En
conclusion (elle sera peut-être un peu longue, veuillez d'avance
m'en excuser), si vous voulez voir de l'action, du sang, du
gore, le " Soldat Ryan " de Spielberg est fait pour
vous. Par contre si vous voulez appréhender la Seconde Guerre
Mondiale, différemment, alors vous devez tout simplement voir,
la " Ligne Rouge ". Car ce film a choisit d'exploiter
une piste totalement nouvelle et qui s'oppose aux " sentiers
" choisies par Platoon, Apocalypse Now... Il s'agit de
la voie de la contemplation face à la nature. Les autres films,
nous montrent l'horreur de ce monde à coup d'images choc et
d'une ambiance à la fois glauque et grandiose : américaine...
Alors que, dans la " Ligne Rouge ", le rythme est
paisible, les scènes d'atrocités sont ralenties et assourdies,
il s'agit plus d'une attitude de réflexion volontaire, qui n'est
pas forcée par des images chocs, et amplifiées par une musique
dantesque. La Ligne Rouge est ainsi plus qu'un film, c'est une
réflexion !
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